Angela Merkel à Bakou, entre contrats, droits de l’homme et Haut-Karabakh.

Par Edouard Pontoizeau

PHOTO DES DÉLÉGATIONS ALLEMANDES ET AZERBAÏDJANAISES SOUS LE REGARD D’HEYDAR ALIYEV AU PALAIS PRÉSIDENTIEL (C) /AZERTAC. 2018.

La Chancelière allemande Angela Merkel s’est engagée sur le terrain sinueux du Caucase pour sa dernière sortie internationale avant la rentrée 2018.

Après une visite en Géorgie puis en Arménie, la locataire de la chancellerie a fini son périple à Bakou en Azerbaïdjan le 25 août dernier. L’objectif semble aller en prolongement avec la ligne de l’Union européenne en favorisant les accords commerciaux avec les pays du Caucase, jouer un rôle diplomatique dans la région et surtout approfondir les liens déjà bien réels avec le Partenariat oriental.

Certaines thématiques sont en effet revenues fréquemment durant les rencontres qu’a effectué Angela Merkel, que ce soit la pacification de la région, le développement économique, mais aussi les droits de l’Homme.

  • Les accords commerciaux

L’Allemagne est le pays le plus gourmand en consommation d’hydrocarbure de l’Union européenne. Selon Eurostat, l’Allemagne aurait importé 81,612 millions de tonnes de gaz (soit quasiment un quart de l’importation totale de gaz de l’Union européenne), et 130,243 millions de tonnes de pétrole en 2016. La croissance économique allemande, largement supportée par la hausse des exportations dans le secteur de l’industrie de l’automobile et des biens de consommation (produits ménagers notamment), implique de facto toujours plus d’importation d’hydrocarbure pour faire fonctionner les chaînes de production des usines. De plus, l’Allemagne tend à réduire la part du charbon et de nucléaire dans la production d’électricité en instaurant certes une véritable politique de production « verte » d’électricité, mais en faisant appel aussi à la solution facile (mais moins polluante) du gaz naturel.

Cette coopération énergétique avec l’Azerbaïdjan s’inscrit dans une période de transition énergétique certaine, à la fois en se débarrassant définitivement du spectre du nucléaire d’ici les prochaines décennies, mais aussi en réduisant autant que faire se peut la part de l’industrie ô combien polluante du charbon.

Politiquement, l’Allemagne, tout comme l’Union européenne, tendent à chercher d’autres partenaires que la Russie, et trouver une alternative, certes encore prématurée et peu réalisable avant de parler d’offre de substitution. Il s’agirait en fin de compte de diversifier l’offre en vue de réduire la dépendance énergétique du géant russe a minima.

Tandis que la Turquie a elle-même considérablement augmenté ses importations en gaz d’Azerbaïdjan, l’Allemagne semble aussi amorcer une ouverture dans ce sens, peu de temps après les accords de la mer Caspienne.

  • Politique

Bien que les relations commerciales semblent être plus que jamais au beau fixe, deux sujets pour le moins épineux persistent et troublent les relations entre l’Azerbaïdjan et l’Allemagne.

  • Les droits de l’Homme

Un sujet sur lequel l’Union européenne n’a pas semblé prêter autant d’attention que nécessaire, mais auquel Merkel a pourtant souligné les impératifs de modifier les méthodes coutumières de répressions et des conditions carcérales. Le déficit de liberté d’expression et de liberté de presse poursuit l’image peu reluisante du régime en place. La situation des droits de l’Homme semble d’autant plus préoccuper Berlin, qu’elle est un frein à l’avancement du Partenariat oriental.

Par frein, on entend ici l’incapacité de poursuivre les fameux « accords de stabilisation et d’association ». Ces accords permettraient, à mesure que des efforts en matière de lutte contre la corruption, de démocratisation et de libéralisation économique (ouverture économique) ont été faits, d’obtenir des prêts/fonds européens pour la transition économique (diversification économique, passage à l’économie de marché, etc.) et des facilitations de circulation entre l’Azerbaïdjan et l’espace Schengen (suppression des visas, etc.).

  • Le Haut-Karabakh

Enfin, le positionnement de l’Allemagne semble désormais s’éclaircir sur la situation dans le Caucase. Tandis que Merkel dénonçait à Tbilissi l’occupation russe dans les deux républiques autoproclamées d’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, celle-ci a clairement appelé à un règlement pacifique du conflit opposant l’Arménie et l’Azerbaïdjan depuis 1991.

En dépit d’un cessez-le-feu signé en 1994, les accrochages armés y restent fréquents et restent un point noir en matière de résolution de conflit, en plus de miner le développement de l’Arménie et d’une large partie de l’Azerbaïdjan, dont le budget militaire a atteint en 2017 : 2,6 milliards de manats, soit approximativement 1,5 milliard de dollars.

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